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Loos-en-Gohelle – Chapitre 3 : La démocratie participative sur un territoire populaire

Enfant du pays dont le 3ème mandat est en cours, Jean-François Caron a succédé à son père, Marcel Caron, élu en 1977, lui-même succédant à son père. On peut voir dans cette saga familiale les scories de la culture minière paternaliste, dans laquelle les sociétés charbonnières prenaient tout en charge (travail, logement, les activités sportives et culturelles, équipements publics, etc.) (8). Fort d’un passé associatif local et de son histoire familiale, Jean-François Caron arrive avec des idées novatrices et un projet politique affirmé pour Loos-en-Gohelle. Entre volontarisme politique et culture paternaliste, l’idée d’une démocratie participative ne coulait donc pas de source à Loos-en-Gohelle ! Pourtant, c’est le pari qu’a lancé Jean-François Caron.

 

Au chapitre précédent, nous avons vu que le développement d’une « démocratie narrative » permettait en partie de répondre à ce paradoxe. Mais la mise en récit ne fait pas tout ! La participation active des habitants est considérée par la Mairie comme un « gage de durabilité », « au fondement de l’action ». Les bénéfices décrits sont multiples : intelligence collective, légitimation de l’arbitrage politique, adaptation aux besoins réels, création de lien social et de « sens commun » (9). Pour Jean-François Caron, faire participer la population est essentiel pour rendre les habitants acteurs de leur vie et de leur ville, sur ce territoire touché par la désindustrialisation et le chômage. « Pour nous, c’est même une thérapie ». Une manière de tourner le dos aux habitudes culturelles du passé.

Quels dispositifs pour impliquer les habitants ?

Pour impliquer les habitants, la Ville utilise à la fois des méthodes classiques de concertation et des méthodes privilégiant l’action concrète et la responsabilisation par le « faire ».

© Les Blongios : http://www.lesblongios.fr/blog/projets-participatifs-de-territoire/juillet-2014-prop-a-terre-a-loos-en-gohelle

Méthodes classiques

En amont des politiques publiques, la Mairie recueille systématiquement les avis des habitants dans une démarche de concertation. Elle organise la co-élaboration des politiques publiques en faisant se confronter des avis contradictoires dans le but d’arriver une décision commune. Les commissions portent sur des thèmes (sécurité routière, cadre de vie…), des zones géographiques de la ville (un quartier, une rue…), des catégories d’usagers (parents d’élèves…) ou des services fournis par la ville (jeunesse, culture…). Le Maire est décrit par ailleurs comme quelqu’un de « très conciliant, très à l’écoute, proche des habitants ».

 

Des moyens particuliers sont dédiés au Quartier Ouest, qui couvre trois anciennes cités minières (Cité 5, Cité Belgique et Cité Bellevue) isolées du centre-ville. Depuis les années 2000, les locataires sociaux constituent la population majoritaire des anciennes cités du Bassin Minier, auparavant réservées aux seuls ayants-droits des mines. Plus d’un tiers de nouveaux arrivants sont demandeurs d’emploi (10). Depuis trois ans, un demi-poste d’agent municipal est dédié à l’animation d’un conseil de quartier, le « groupe du Quartier Ouest », dans le cadre d’un projet de transformation urbaine. Un Conseil Citoyen vient également d’être mis en place, conformément aux nouvelles obligations légales.

Responsabiliser par le « faire ensemble »

Mais les dispositifs de participation ne se limitent à pas à la co-élaboration des politiques publiques. Pour mobiliser les habitants le plus largement possible, la Mairie a mis en place des dispositifs de co-production de projets concrets. Le plus abouti se nomme le programme « fifty-fifty » : lorsqu’un groupe d’habitants, une association, une école saisissent la commune pour une action d’amélioration du cadre de vie, la Mairie soutient financièrement et techniquement le projet et la réalisation ou la gestion est effectuée par (ou avec) les demandeurs. Par exemple, si une association souhaite améliorer le fleurissement de sa rue ou repeindre une maison de quartier, elle peut saisir la commune qui lui fournira le matériel nécessaire (jardinières, fleurs, peinture…). L’association aura alors la charge de réaliser le projet et de l’entretenir. C’est une manière concrète de rendre les habitants acteurs.

 

Le programme « fifty-fifty » participe au développement de la vie citoyenne sur la ville, reconnue pour son dynamisme. On dénombre désormais plus d’une centaine d’associations locales pour 7500 habitants. Pour Jean-François Caron, il permet de répondre à une condition essentielle de la démocratie participative : responsabiliser les habitants par le « faire » (le projet ne sera réalisé que s’ils ont la volonté de s’y engager). Pour lui « participation sans responsabilisation, piège à cons ».

Concilier aspirations des habitants et vision politique

© AFP PHOTO / FRANCOIS LO PRESTI http://www.la-croix.com/France/L-Unesco-distingue-le-patrimoine-minier-du-Nord-Pas-de-Calais-2012-07-01-825782

Les dispositifs incitant à la participation sont donc multiples, mais la ville de Loos-en-Gohelle illustre donc un paradoxe : d’un côté, il y a un projet politique de transition écologique affirmé porté par une équipe municipale volontariste et visionnaire, où le développement durable est une finalité ; de l’autre, il y a la volonté de prendre en considération les aspirations des habitants (11).

 

Ces deux volontés peuvent se rejoindre ou entrer en conflit. Une parole de l’ancienne directrice de cabinet du Maire illustre très bien ce paradoxe : « Lorsque l’on sort d’une réunion et que l’on est arrivé obtenir un accord qui convienne à tout le monde on est content. En même temps, il faut quelques fois prendre des risques. Si vous allez dans le sens du consensus, vous allez être moins innovant en matière de développement durable. Il faut qualifier les gens » (12). Il y a donc un équilibre à trouver entre le fait d’écouter les aspirations des habitants et la nécessité de les convaincre d’agir dans le sens du développement durable comme finalité.

Là où les aspirations rejoignent le projet politique

Sur les questions liées à l’aménagement d’espaces verts et à la préservation des espaces agricoles, les démarches en faveur d’un développement durable suscitent l’adhésion des habitants. Cette adhésion provient non pas d’un souci écologiste, mais d’une volonté d’améliorer leur qualité de vie. Il en va de même pour les actions en faveur d’une production agricole locale, et de services de proximité : les habitants sont en demande d’une plus grande proximité des échanges, perçue notamment comme un moyen de maintenir des emplois locaux. Enfin, sur la question de la mobilité, il y a à la fois adhésion et rejet du développement durable comme finalité : les habitants plébiscitent les transports doux, tout en souhaitant le renforcement des infrastructures automobiles (augmentation du nombre de places de stationnement, problème de la saturation des routes, etc.) (12).

Là où les aspirations entrent en conflit avec le projet politique

Au cœur des préoccupations des habitants semblent se trouver la sécurité et la salubrité des logements. Les démarches de développement durable entreprises par la municipalité (tri des déchets, installation de jardinières dans l’espace public, etc.) sont parfois perçues comme non prioritaires. « La Mairie ferait mieux de se concentrer sur… » ceci ou cela. Autre enjeu : il semblerait que les habitants participent davantage lorsque les débats les concernent directement, avec le risque que certains intérêts personnels priment sur l’intérêt général.

 

Les questions du compromis et de la complexité sont donc centrales. Les volontés contradictoires et les paradoxes fourmillent :

# entre promotion du développement durable comme finalité et aspirations des habitants,
# au sein des aspirations elles-mêmes,
# dans les différentes lectures et appropriations de la finalité.

La démocratie se caractérise par un ensemble d’interactions sans cesse changeantes, s’incarnant différemment à différentes échelles, sur différents territoires et différemment suivant les enjeux, les volontés politiques et les aspirations. C’est un exercice concret, une expérimentation permanente.

Des habitants difficiles à mobiliser, notamment sur le quartier Ouest

Décréter la démocratie participative ne suffit pas. Encore faut-il que les citoyens aient l’envie et le temps de participer. Etant donné la situation géographique et sociale du quartier Ouest, nous avons trouvé particulièrement intéressant de voir comment ses habitants se sont emparés des démarches participatives.

 

En discutant avec deux résidentes et les services municipaux, nous nous sommes rapidement aperçu que très peu d’habitants du quartier Ouest sont impliqués dans les démarches participatives. En 2015, la Mairie a, par exemple, eu beaucoup de difficultés à trouver quatre personnes volontaires pour former le Conseil Citoyen regroupant les trois cités. De même, il y a environ trois ans, une permanence d’élus mensuelle a été remise en place sur le quartier Ouest, avec une rotation dans chacune des trois anciennes cités minières, et la présence des bailleurs sociaux une fois sur deux. Alors qu’on pourrait voir dans la faible fréquence de ces permanences un manque d’intérêt de la Mairie, nous sommes étonnées d’apprendre que les habitants ne se déplacent pas pour rencontrer les élus municipaux : quand le bailleur social n’est pas présent, personne ne vient !

 

Même pour des projets de mise en récit de l’histoire des habitants et de leur quartier, la mobilisation est rare. Par exemple, un spectacle participatif devait être organisé en 2014 sur la friche de l’”entre-deux” pour préfigurer la construction d’un nouvel éco-quartier. Après avoir réalisé des reportages sur la mémoire du quartier Ouest, un scénario devait être construit collectivement pour montrer Loos-en-Gohelle dans 200 ans. Ce projet était ouvert à tous les habitants de la commune, à n’importe quelle étape du projet, en tant que témoin ou acteur. Au total, seule une dizaine de personnes s’est mobilisée.

 

Ainsi, de réelles difficultés se sont révélées à nos yeux en ce qui concerne l’intégration des habitants aux processus décisionnels. Nous n’avons pas pu interroger des habitants d’autres quartiers, mais le Maire reconnaît que la dynamique de participation est retombée depuis ses débuts au début des années 2000.

Les freins à la participation

Tout au long de notre exploration, nous avons recueilli des avis très divers et parfois contradictoires concernant les raisons pouvant expliquer la mobilisation moindre de la population, du moins sur le quartier Ouest.

Trop de participation = moins de participation ?

Le manque de participation serait-il dû à une trop grande confiance des habitants dans l’équipe municipale ? C’est ce que pense Jean-François Caron qui raconte que la moitié de la ville se déplaçait pour les premières réunions publiques, dans les années 2000. La municipalité ayant depuis systématisé le principe de consultation, les habitants auraient développé une confiance accrue dans le processus de prise de décision, et par conséquent accorderaient de moins en moins d’importance au fait d’aller défendre ses intérêts en personne. Ce qui se solderait par une mobilisation moindre. Paradoxalement, ce serait donc la transparence et la confiance qui tueraient la démocratie participative ! C’est le problème classique théorisé sous le nom du « passage clandestin » : chacun faisant l’hypothèse que son voisin ira défendre leurs intérêts communs et que ceux-ci seront correctement pris en compte, plus personne ne se mobilise.

Des citoyens découragés ?

Evidemment, tout n’est pas si simple. Si les habitants ne se mobilisent plus autant, c’est peut-être aussi à cause d’un certain découragement. « Pour que les citoyens prennent au sérieux ce type de procédure, ils doivent être convaincus que leur avis sera pris en compte », explique Loïc Blondiaux, professeur de science politique à l’université Paris I (13). Or, les témoignages que nous avons collectés semblent montrer que sur le Cité Belgique du Quartier Ouest, les habitants ont le sentiment que « la Mairie ne fait rien pour la Cité » ou, en tout cas, qu’« il n’y a pas de suivi ».

 

En outre, une fatigue a pu s’installer au fil des années. Les habitants ont parfois l’impression qu’on leur en demande beaucoup. Participer, ça prend du temps, d’autant plus que ce sont souvent les mêmes qu’on retrouve dans plusieurs instances. Le mécanisme de « fifty-fifty » peut être par ailleurs perçu par les associations comme un désengagement de Mairie sur certains projets.

 

Il est possible que les erreurs de méthode qui ont été commises dans le processus de consultation les premières années aient aussi découragé les habitants. Par exemple, les groupes de citoyens participants aux consultations n’étaient pas forcément représentatifs. L’équipe municipale s’est ensuite aperçue qu’il ne suffisait pas de ne convier que les riverains lors de la construction d’un nouvel équipement public, mais aussi les futurs usagers. Toujours sur la question de la représentativité, les élus de l’opposition pointent également un manque de concertation autour du futur éco-quartier sur le quartier Ouest : « Le maire aurait dû élargir le cercle de réflexion et s’adresser à tous les acteurs locaux » (13).

 

Enfin, les projets participatifs à l’initiative de la Mairie, comme le spectacle sur la friche de l’entre-deux’, semblent perçus par certains habitants comme s’inscrivant dans une « démarche trop descendante » et ne répondant pas vraiment à leurs besoins réels.

Les restes de la culture paternaliste et le sentiment d’appartenance

Lors de nos rencontres, l’histoire paternaliste du territoire a souvent été évoquée comme un frein à la participation des habitants. « Tout était fourni. Les gens, en l’échange d’un travail difficile, étaient logés, chauffés, bien payés et divertis ». Cette prise en charge paternaliste aurait laissé une certaine « culture » du laisser-faire, des attentes à l’égard des pouvoirs publics, dont on attendrait une prise en charge sans implication citoyenne. Le Maire explique que « pendant cent-cinquante ans, tout était écrit d’avance, encadré par les houillères. Aujourd’hui, on hérite d’une société qui est assez suiveuse. Cela fait quinze ans qu’on essaie de mettre en place l’idée d’un vivre-ensemble » (13). Débattre, écouter l’autre et faire des compromis s’apprend. C’est toute une culture de la participation qui doit infuser. Un processus long qui n’a pas encore abouti : la plupart des personnes rencontrées dans les commerces du centre-ville ignoraient tout de la démocratie participative dans leur ville, malgré les nombreuses publications municipales sur ce sujet.

 

Malgré l’importance des habitudes culturelles, il nous a semblé que la réalité était plus complexe. Par exemple, une habitante de la Cité Belgique a souligné l’absence d’implication des nouveaux arrivants qui « s’en foutent » car ils n’ont pas d’attachement à la Cité. Au contraire, les mineurs ont tenu un rôle crucial dans les années 90 dans la lutte pour la préservation de la Cité minière. Cet exemple nuance l’idée selon laquelle une histoire marquée par une culture paternaliste brimerait la participation des habitants.

Le principe de participation des habitants n’est pas une idée partagée

Pour terminer, il nous paraît important de rappeler que la participation n’est pas forcément une idée partagée. Aujourd’hui, la participation devient parfois une injonction. Un « bon » citoyen serait un citoyen qui participe. Mais comme le dit un très cher ami, « on peut avoir envie de construire non pas un « projet de société » mais un projet de vie et de carrière épanoui chez soi, autour d’une famille ». De même, l’expertise d’usage n’est pas toujours reconnue par les institutions et l’issue des démarches participatives pas toujours perçue comme allant dans le sens de l’intérêt général.

Le mot de la fin : la démocratie ne se joue pas qu’à l’échelle locale

Au-delà des possibles freins à la participation développés précédemment, il en est un peut-être plus puissant que tous : le sentiment que la partie se joue à autre niveau. Malgré de réels efforts municipaux pour systématiser les démarches participatives ainsi qu’un fort volontarisme politique pour mener la transition écologique et sociale de la ville, nous avons en effet l’impression que les habitants se sentent peu en prise avec ce qui a un véritable impact sur leur vie, en premier lieu la situation économique.

 

La ville a gagné la réputation de « ville pilote du développement durable » et rayonne au niveau régional, voire national, mais les bénéfices concrets des politiques locales visant à redynamiser l’économie et l’attractivité de la ville ont du mal à se faire ressentir dans le quotidien des habitants. Si les habitants reconnaissent les bénéfices de ce qu’entreprend la municipalité à un niveau collectif, ils ne voient pas forcément d’impact sur de leur vie quotidienne. « Le travail de mémoire est important, mais ce n’est pas la mémoire qui nous fait vivre. »

 

Comment ne pas se sentir désemparé face aux logiques économiques de la mondialisation et au phénomène de la métropolisation qui vident les petites villes de leurs jeunes, de leur commerces et de leurs entreprises ? Comment ne pas se sentir impuissant lorsque son bar reste vide toute la journée alors qu’une vingtaine d’années auparavant, il ne désemplissait pas ? Comment ne pas se sentir impuissant lorsque se délite la culture locale qui tissait autrefois des liens très forts entre les habitants, alimentait un puissant sentiment d’appartenance au territoire et donnait l’impression aux mineurs d’être utile pour le pays tout entier ?

 

Les réélections de Jean-François Caron en 2008 (82,1%, le record régional) et en 2014 (liste unique) n’a pas empêché pas les électeurs de Loos-en-Gohelle d’avoir voté à plus de 50% pour le Front National aux élections régionales de 2015.

 

La démocratie se joue donc aussi au-delà de la participation à l’échelle locale, car le pouvoir d’agir de la population dépend de sa capacité à maîtriser les forces extérieures s’exerçant sur son territoire, que ce soit dans le domaine politique, économique ou démographique.

Auteurs : Aurore Bimont & Marie Verrot

La suite bientôt…

SOURCES

(8) Les fins observateurs noteront que la salle municipale jouxtant la Mairie porte aussi le nom de “Omer Caron” !

(9) Site internet de Loos-en-Gohelle : http://www.loos-en-gohelle.fr/

(10) Diagnostic territorial du Bassin Minier, Pôle observation-prospective de la Mission du Bassin Minier, mars 2013

 

(11) L’aspiration est définie comme un processus psychosociologique par lequel un sujet (individu ou groupe) est attiré et poussé vers un objet proche ou lointain, à travers des images, des représentations, des symboles, et qui contribue à définir et à orienter ses projets.
La finalité est un projet ou un ensemble de projets coordonnés constitués en « but final » aux yeux de l’individu ou du groupe social pour lequel il est défini, compris, ressenti, cristallisé en objet social extérieur, et qui, par la puissance d’attraction et d’orientation dont il est chargé, suscite un tropisme de l’individu ou du groupe social considéré, qui tenteront de l’atteindre.

 

(12) Le développement durable face aux aspirations : Analyse d’écologie sociale, Thèse d’Anne-Sarah Socié sous la direction de Philippe Combessie, soutenue publiquement le 22 septembre 2014, p.223/224

 

(13) « A Loos-en-Gohelle, les citoyens deviennent acteurs de leur ville », La Croix, 26/01/2016 http://www.la-croix.com/Actualite/France/A-Loos-en-Gohelle-les-citoyens-deviennent-acteurs-de-leur-ville-_NG_-2012-01-26-762502

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