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Tout est chaos, tous mes idéaux des mots abimés, je suis génération désenchantée !

Petite, adolescente et maintenant adulte, j’ai toujours aimé les contes et légendes, la mythologie, les dessins-animés, les films de chevaliers ou ceux colorés de magie et de merveilleux. Cet univers peuplé de héros, de chevaliers, de fées, magie, sages et dragons m’émerveillait, me touchait profondément et je pouvais m’y réfugier des heures.  De mes premières histoires d’enfant, l’un des souvenirs les plus marquants de contes est celui où la fée de Cendrillon transforme la citrouille en carrosse blanc. Passage qui je pense a marqué nombre de petites filles à travers les générations ! C’était tellement merveilleux d’imaginer qu’une petite dame ailée était capable de transformer la matière d’un coup de baguette magique et de défendre la pauvre Cendrillon. Déjà petite, je pouvais être touchée par les justiciers magiques du monde fantastique et je pleurais face à l’injustice de la perte de Mufasa, père de Simba dans le Roi Lion. Les histoires fantastiques ne sont pas de longs fleuves tranquilles et souvent les aventures apportent morale et notion de « bien-commun ». D’ailleurs, elles se terminent souvent par « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ! » Notre monde est-il si éloigné de celui des contes de fée ?

Je ne terminerai pas l’observation de notre monde par « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ! », je dirai même que personnellement, je me pose encore la question de faire des enfants, ou la question du monde que nous leur laissons. Nous sommes forcés de constater que les inégalités sont toujours croissantes quelles soient politiques, économiques, sociales, culturelles … Que de plus en plus de personnes à travers le monde n’ont pas ou peu accès à l’alimentation, le logement, l’éducation, la santé et que l’injustice ressentie engendre conflits et violence. Nous sommes encore loin du « bien-commun » Ajoutons à tout ceci le non-respect de notre habitat, de la nature, de la terre et ses êtres vivants et nous obtenons un tableau majoritairement sombre de l’état de notre monde. Nombre de personnes clament le « no future ! » Pourtant, parmi cette vision catastrophe d’un monde désenchanté, nous observons de plus en plus de fées « au féminin », « au masculin », de plus en plus de ré-enchanteurs du monde, de magiciens bienveillants pour nos sociétés et notre habitat plantant des graines ou haricots d’un nouveau « demain ». Au sein de plusieurs articles, nous définirons bien sûr ces termes aux couleurs féeriques et fantastiques et aborderons des questions telles que : Qu’est ce qu’une fée ou un ré-enchanteur du monde aujourd’hui ? Et si nous avions perdu le sens, la signification de la magie dans nos vies ? Et si chacun de nous avait l’opportunité de ramener sa part de magie dans le monde ? Et si nous étions tous des potentiels ré-enchanteurs ? Et si l’univers lui même avait sa composante enchantée ?

Mais avant d’entrer dans cet univers, il est nécessaire de faire un point sur la notion essentielle du « réenchantement ». Quel mystère se cache derrière ce mot ? Que signifie-t-il ? Qui sont les personnes ayant utilisé ce terme ?…

Rationnellement, la présence du préfixe « ré » précédent le mot enchantement sous-entend qu’il ne peut y avoir de « Ré-enchantement » que suite au « désenchantement » préalable et une prise de conscience de celui-ci !

Max Weber, sociologue allemand du 19ème siècle est l’un des premiers à parler de « désenchantement du monde » (Entzauberung der Welt) et cette formule sera reprise par de nombreux philosophes et sociologues ensuite. Selon ses écrits, le désenchantement du monde est principalement liée à la « modernité scientifique et la modernité capitaliste»1. Dans l’éthique protestante et l’esprit du capitalisme », il donne une définition du désenchantement comme « recul des croyances religieuses et croyances magiques1 comme mode d’explication du réel et technique de salut». Le progrès de la science associé au développement du capitalisme affaiblissant toute possibilité d’explications surnaturelles ou de l’ordre de l’invisible et atrophiant la place accordée au rêve et à l’imagination humaine. Le monde est privé de sa dimension symbolique, mythique, l’imaginaire est disqualifié. Mircea Eliade, historien des religions, mythologue, philosophe et romancier roumain cite que la modernité a engendré « une dégradation du sacré2 sans précédent au profit d’un projet de société fondé exclusivement sur le rationalisme économique et le matérialisme. » Ilya Prigogine (physicien et un chimiste belge), Gilbert Durand (auteur de « Structures anthropologiques de l’imaginaire »), M. Maffesoli (sociologue français. ancien élève de Gilbert Durand) et E. Morin (Sociologue et philosophe français) suivent ce courant de pensées et établissent à leur tour le lien entre la science classique moderne et le désenchantement du monde ou des sociétés humaines3. L’idée pour moi n’est pas de dire « Avant c’était mieux ! », et de penser qu’il y eut une période enchantée supérieure lorsque les mythes étaient un moyen d’expression et d’explication. La science classique a bien sûr fait reculer l’ignorance humaine. Les hommes de science ont permis de transformer ou élucider des phénomènes de la réalité, des phénomènes jadis attribués aux forces surnaturelles. Nous sommes passés de sociétés ou le religieux, le culte, le mythe étaient très présents, donc des sociétés à dominance « mythos4» à un système de pensées ultra cartésien, hyper-rationnel où le pôle « logos » est dominant  et le « mythos » fantaisie.

Au fil du temps, l’expression « désenchantement » prend un sens plus général et envahi le langage commun. Il renvoie au sentiment de perte de sens, à la désillusion, au déclin des valeurs et idéaux censés participer à l’unité des sociétés et entrainant ainsi un sentiment d’abattement, et de désespérance… Le dictionnaire Larousse ne donne d’ailleurs que cette définition. « Désenchanté = perte d’une illusion, déception dans son attente ; déconvenue, désillusion. » Mylène Farmer illustre cette tendance populaire de désillusion dans les années 90 dans la chanson « désenchantée » Bien sûr cette utilisation spécifique concerne dans sa chanson sa désillusion dans un domaine spécifique sociétal. Le titre sort en 1991 dans une période de morosité en France. On parle beaucoup des déçus du mitterrandisme, François Mitterrand ayant été réélu président de la République en 1988 à la suite d’une campagne qui avait particulièrement séduit les jeunes, campagne portée par le slogan « Génération Mitterrand ». La chute du mur de Berlin en 1989 est encore présent dans les esprits lorsque cette chanson commence son succès… Dans celle-ci et surtout dans son clip, elle porte son regard sur la misère sociale, la stigmatisation des exclus, les conditions de travail mais aussi une certaine autorité, proche d’une dictature (allusion au nazisme). Tout ceci étant loin de ces idéaux de société, d’où le terme de « génération désenchantée ». Cet exemple reflète bien l’entrée de ce terme dans notre vocabulaire commun contemporain.

Si selon tous ces auteurs contemporains, populaires, le désenchantement correspond au déclin des valeurs, des idéaux ainsi qu’au recul du « Mythos4 » au profit principal du « logos » et de l’hyper-rationalisme dans nos sociétés, par logique d’opposition nous pourrions définir le réenchantement comme un processus qui retrouve valeurs, idéaux, éthique en ré-intégrant dans la norme du réel le rationnel et le mystique5

Mohammed Taleb, philosophe et historien algérien contemporain du 21ème siècle enseignant à Lausanne, auteur de « L’écologie vue du Sud. Pour un anticapitalisme éthique, culturel et spirituel » incarne cette tendance. Il cite : « L’enjeu n’est pas de réconcilier le réel et l’imaginaire, car ici aussi on oppose encore les deux parties, mais d’accepter que l’imaginaire soit réel. Que le réel est plus que matériel ! ». Luc Bigé, docteur en sciences (biochimie), fondateur de l’Université du symbole, et auteur de nombreux ouvrages, suit aussi ce courant de pensée lorsqu’il écrit : « Nul ne ré-enchante le monde, il s’agit seulement d’une question de regard. L’œil utilitariste rend la nature utile, la vision poétique la rend belle et lumineuse. Explorez le monde  imaginal, cette réalité invisible. En ces espaces fleurissent les mythes, légendes, les esprits des plantes, les ondines 6…» Ce que je trouve intéressant dans cette idée est la notion de nature ou monde déjà enchantés. Selon lui, quelque soit l’époque, le lieu, le paradigme, le monde et la nature sont enchantés. C’est par contre notre rapport à ces derniers et notre regard qui sont désenchantés. Victor Hugo disait : « C’est une triste chose de songer que la nature parle et que l’être humain n’écoute pas. ».

Je partage aujourd’hui l’idée qu’il est nécessaire d’équilibrer les pôles « logos » et « mythos », qu’il y ait un dialogue entre les deux univers langagiers, un mariage, une alliance entre dimension sacrée du monde et science dans nos sociétés mais aussi dans nos vies. Je suis, pour ma part, convaincue que la nature est enchantée et que la vie possède sa magie.

En poursuivant mes recherches sociologiques sur d’éventuels acteurs du changement ayant une vision holistique, j’ai découvert le terme de « créatifs culturels7 ». J’aime beaucoup ce terme car il témoigne de notre capacité créative, de notre imaginaire mais contacte aussi nos racines, notre histoire pour repenser la société. Un regroupement de plusieurs études américaines sur les “acteurs de changement de société”, menées auprès de plus de cent mille personnes par une équipe dirigée par le sociologue Paul H. Ray (université du Michigan) et la psychologue Sherry Ruth Anderson (université de Toronto), affirme dans l’ouvrage « L’émergence des Créatifs Culturels » qu’un quart environ des citoyens américains vivrait aujourd’hui déjà dans un système de valeurs et de comportements différents, ouvert à l’écologie, la solidarité, l’éveil intérieur… Ces personnes, sans porter ce titre, existent sur tous les continents et sont à mes yeux des ré-enchanteurs du mondes ou artisans du monde merveilleux en action pour un monde plus juste, plus beau, et plus vrai. Ils associent valeurs éthiques et imagination active ou créativité. J’aimerais découvrir leur « mythos », leur mémoire, leur histoire, leur connaissance… Qu’est ce qui les animent profondément ? … Bref, réaliser une investigation en quête de leur vérité. A travers ce travail, j’espère sensibiliser à un autre type de regard enchanté amenant espoir, rêve et encouragements.

Amélie, « Ré-enchanteuse Investigatrice Apprentisseuse »

où « Fée Reporter en quête de Vrai »,

Actuellement à Lima, Pérou.

1 L‘éthique Protestante et l’esprit du capitalisme, Max Weber

2 Le sacré et le profane, Mircea Elias

5 Qui a trait au mystères, aux choses cachées ou secrètes, dictionnaire historique de la langue française, Le Robert 2010

6 réenchanterlemonde.com

7 Terme désignant un groupe socio-culturel qui serait à la pointe du changement social et qui a été mis en évidence par le sociologie Paul Ray

3 Les 2 faces de la Sciences selon Edgar Morin :

Le but de la science aujourd’hui est de démontrer à l’homme que la raison seule permet de comprendre les phénomènes de la réalité et de comprendre le monde. Le réel est ce qui peut être expliqué par la science. Grâce à elle, tout peut être mis en équation mathématique, démontré, justifié. Ceci induit que le cerveau humain, la raison, est donc capable de comprendre toutes les lois, les causes des phénomènes de l’univers. Elle présuppose donc de l’inexistence d’une cause divine ou mystérieuse.

Face 1 : Succès de la science :

« La science est une connaissance vivante qui, en se livrant à la grande aventure de la découverte de l’univers, de la vie et de l’homme, a apporté, au cours du XXe siècle, un fabuleux progrès dans le savoir humain »  (La Méthode 2, La vie de la vie, E. Morin)

Assurément, la science classique a fait reculer l’ignorance humaine. Les différentes recherches ainsi que des technologies de plus en plus précises ont permis de transformer ou élucider des phénomènes de la réalité jadis attribués aux forces surnaturelles par exemple. Certainement qu’elle élucidera encore certains mystères en physique quantique, ou d’autres sciences. Une telle quantité de nouvelles connaissances acquises en si peu de temps amène les cartésiens a considérer la science comme seule voie d’explication du réel et seule voie du progrès.

Face 2 : Science Génératrice de violences, asservissement, misères et même barbaries…

« La science classique comportait des possibilités terrifiantes d’asservissement, voire d’anéantissement de l’humanité ». (La Méthode 2, La vie de la vie, E. Morin) E Morin précise que l’accroissement scientifique aura été synchrone à l’affaiblissement de la part mythologique et idéologique dont bénéficiait la société et les individus. Il dit que le scientisme associé au capitalisme entraine « un véritable cataclysme idéologique » 

En effet, la science n’a pas toujours été moteur de progrès pour l’humanité et les sociétés. Selon les actions qu’elle induit, selon les sociétés qu’elle transforme, on peut se poser la question de la morale et de l’éthique. La science moderne au service du capitalisme, contrôlés par les politiques et les détenteurs des capitaux détient alors le pouvoir de décisions des recherches et d’exploitation des résultats.

4   » Mythos et Logos » Synthèse de la conférence de Mohammed Taleb Mars 2015

Dans la conception grecque du langage, existaient deux grandes familles de livres et de langage. Les deux familles sont complémentaires, égalitaires et sont toutes les deux des voies d’accès au sens.Dans la première catégorie, nous trouvons par exemple le code pénal, le code civil, la déclaration des droits de l’homme, la géométrie, la chimie, la physique, la mécanique, les manuels de médecine, la sociologie, la biologie, l’anthropologie… Nous y associons la science et plus précisément la RAISON. Nous y trouvons, en général les disciplines qui se terminent par LOGIE. Il s’agit de la catégorie LOGOS : la compréhension rationnelle, dont la matière première est le CONCEPT. Ces concepts décrivent le monde, les relations aux autres et le maître mot du LOGOS est PREUVE. La seconde famille langagière comporte par exemple : les Mille et une nuits (tradition Arabe), l’Iliade et l’odyssée (Grecs), la quête du Graal (Moyen-âge), les textes mythologiques anciens, les contes de Grimm, et autres contes populaires… Il s’agit de la catégorie MYTHOS : la matière première est l’IMAGE (ou symboles). C’est le registre de la figure. Le maître mot du MYTHOS est ÉPREUVE. On y associe l’imaginaire, l’art… Quelques Figures imaginaires par exemple : Merlin, Hermès, Simbad…Depuis 400 ans, depuis l’émergence du capitalisme au 17ème siècle, c’est le pôle LOGOS qui prédomine dans notre vie intérieure et notre vie sociale. Le Logos domine donc la pensée occidentale. En effet, dans l’axiome moderne, tout ce qui n’est pas soumis à la Preuve n’est pas dans la réalité et on oppose le réel matériel à l’imaginaire. Dans le meilleur des cas, le Mythos est dans la société d’aujourd’hui de l’ordre de la fantaisie, de l’imaginaire, du fantasque, du loisir… et n’est pas assimilé comme source de savoir, de vérité, de connaissances, ou de réalisation personnelle. »

1Commentaire

  • Natalia

    19.10.2016 at 10:32

    Sigue Hada encantadora y encantada

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